derniere 2cv mangualde

La dernière 2CV, le 27 Juillet 1990 au Portugal

Le Vendredi 27 Juillet 1990, à l’usine Citroën Lusitania de Mangualde, l’heure de la fin de production officielle de production de la 2CV a sonné. Elle y était assemblée depuis l’arrêt officiel des chênes de Levallois-Perret, le 28 Février 1988.

Dernière-Citroën-2CV mangualde

Le 28 Février 1988, la dernière 2CV produite en France sort de l’usine de Levallois Perret. Ce n’est pas pour autant la fin de l’aventure pour la mythique petite Citroën. En effet, la production est relayée dans l’usine Citroën de Mangualde, au Portugal. Elle y perdure pendant 2 ans, jusqu’au clap de fin le 27 Juillet 1990. C’est en Janvier 1962 que l’usine de Mangualde voit le jour avec ses lignes de montage, au nord du Portugal. D’abord nommée « Sociétad Portuguesa Citroën Sava », le site prend la dénomination de « Citroën Lusitania » dès l’année 1964. La production de la 2CV a commancé dès 1963 avec la fourgonnette AZU (2CV Carrinha), la berline arrive en 1965 (2CV Berlina) avec dans le même temps l’Ami 6, suivie par la Dyane, l’Ami 8 et la Méhari. En 1971 la production portugaise de la 2CV est stoppée au profit de la GS! Elle y revient en 1982 et six ans plus tard, le 1er Mars 1988 l’usine Citroën au Portugal devient la seule à produire des 2CV.

Ce maintien délocalisé, à coût réduit par rapport à la France, permet de faire perdurer le mythe pendant 2 ans auprès des aficionados. Les Charleston et 2CV 6 Special produites à Mangualde à partir de 1988 sont commercialisées en France, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Grande Bretagne, Islande et bien sûr au Portugal. La cadence est d’environ 80 véhicules / jour. Mais l’acier est de mauvaise qualité, produit par des fonderies italiennes sur la côte Toscane. Avant que le convoi de wagon-plateaux ne soit plein certaines cargaisons d’acier pouvaient rester plusieurs semaines exposées aux embruns avant de partir pour le Portugal… par conséquent des problèmes récurrents de corrosion apparaissent rapidement sur les deuches produites entre 1988 et 1990. Certaines arrivaient même en concession avec des points de rouille !

La véritable fin de production de la 2CV ne correspond pas à ces dates, aussi bien à l’usine de Levallois qu’à celle de Mangualde au Portugal. On confond souvent « arrêt d’un modèle » et « arrêt de la chaîne de montage ». Quand une voiture cesse d’être produite, il faut fixer une date officielle de fin de vie afin que le réseau commercial sache exactement à quoi s’en tenir au niveau des commandes, et ne se charge pas en voiture qui deviendront impossibles à écouler. C’est la direction générale de Citroën qui a décidé de la date officielle d’arrêt de la 2CV en fonction des stocks de pièces disponibles, des commandes enregistrées et du planning prévisionnel des usines fournisseurs de Metz, Vigo et Orense. Une ligne de production ne s’arrête pas comme ça, du jour au lendemain.
Une fois la date figée, le constructeur n’intègre plus la voiture à son catalogue et considère qu’elle ne fait plus partie de la gamme. Pourtant, même après la fin annoncée de la 2CV, le 27 Juillet 1990, avec la sortie des chaînes de Mangualde du dernier exemplaire, la célèbre photo souvenir de la Charleston grise  prise à 16h30, la 2CV continuait d’être produite. Jusqu’au Mardi 31 Juillet 1990, 11 exemplaires furent terminés sur la ligne d’assemblage de Mangualde, dont trois 2CV 6 Spécial destinées à être exposées au mondial de l’automobile de Paris, en octobre 1990 : une bleue, une blanche et une rouge, mais cette idée n’eut pas de suite.

Après le 27 Juillet 1990 il reste donc encore de quoi fabriquer quelques 2 CV. Il s’agissait de voitures répertoriées et classifiées, donc de voitures tout à fait normales, sauf qu’elles ne figuraient plus sur les cahiers de sorties de chaînes tenus par un préposé, chargé d’établir la carte d’identité du modèle (numéro de châssis, coque, moteur, boîte de vitesses…)
Ces 11 2CV avaient été fabriquées (peinture, soudure, assemblage, serrage…) sur des lignes officiellement fermées, mais continuant pourtant à fonctionner au ralenti. Il est à noter que les 2CV made in Portugal sont loin d’être les plus fiables et les meilleures en terme de solidité. Nous vous invitons à lire le guide des points à surveiller si vous vous intéressez à une 2CV des années 1990.
La der des der des der des der est donc sortie dans l’indifférence générale le 31 Juillet. Le 1er Août 1990, c’était celle fois bel et bien fini, les rares machines-outils furent démontées illico-presto puis rapatriées en France.

Pour l’histoire, et comme il faut bien une fin à tout, c’est donc le 27 Juillet 1990, à 16h30, que la dernière 2CV est officiellement produite à l’usine de Mangualde, suivant, sur la ligne d’assemblage, une série de huit 2 CV 6 Spécial, toutes peintes en Rouge Vallelunga.

Une réception en trois parties est organisée pour l’occasion. D’abord le modèle est choisi : il s’agit de la fameuse 2CV 6 Charleston Gris Cormoran EVP/Gris Nocturne EVR que l’on voit sur toutes les photos d’époque, dont le numéro de série est le n° TW6AZKA0008KA4813. Contrairement à ce que l’on peut souvent lire, elle ne fut pas réservée par le directeur de l’usine, Claude Hébert, qui ne tenait pas plus que ça à récupérer cette 2CV. Citroën France lui avait demandé si il souhaitait que fût mis gracieusement à sa disposition une ou deux 2CV avant la fin de production du modèle, et il n’accepte cette proposition qu’à condition que cela soit le dernier exemplaire fabriqué. D’ailleurs, la voiture reste sur place une bonne dizaine de jours avant de rentrer en France par la route, convoyée par deux chauffeurs de Citroën.

Après avoir choisi le modèle, une mise en scène fût montée sur la ligne d’assemblage avec une trentaine d’ouvriers et les cadres chargés de l’assemblage final. Une pancarte fut apposée sur les plaques d’immatriculation avant et arrière. Il y était inscrit « Dernière 2CV » ou « Ultimo 2CV », selon le pays auquel étaient destinées les photos, la France ou le Portugal. Citroën France insista pour qu’une AX rouge soit visible derrière la 2CV, puisqu’il s’agissait d’une passation de pouvoir entre les deux modèles sur les lignes de Mangualde. L’avant-dernière 2CV fut quant à elle achetée par le sous directeur de l’usine, José Sebastiao.

Une fanfare jouait quelques airs locaux, un buffet était dressé pour tous les employés. Enfin, dans un troisième temps, une séance photo fut organisée à l’extérieur de l’usine : l’ensemble du personnel entourait la dernière 2CV 6 Charleston et la première AX sortie des chaînes de Mangualde. Qu’est-il advenu de la dernière 2CV ? Après avoir été rapatriée en France chez Claude Hébert, qui ne s’en servira presque jamais, elle restera sous une bâche dans le garage familial pratiquement jusqu’en 1997. Cette année là, au décès de Claude Hébert, c’est son fils adoptif, Patrick Bourdeaux, qui en hérite par l’entremise de sa mère qui lui en fait cadeau. Résidant dans la région de Mulhouse, Patrick s’emploie alors à la faire rouler pour qu’elle ne s’abîme pas. Elle totalise aujourd’hui moins de 15 000 kms au compteur. On remarque une curieuse sellerie référencée « Nazaré », garnie d’un tissu écossais et de similicuir noir, qui n’était que rarement montée sur les 2CV locales.

Le 27 Juillet 1990, après une série de 2CV Spécial Vallelunga, une 2CV 6 Charleston est assemblée. Les ouvriers de l’usine l’ont équipée de plaques d’immatriculation « DERNIERE 2CV » à l’avant et « ULTIMO 2CV » à l’arrière.

Elle est assemblée selon les spécificités du marché portugais (bavettes sur les ailes AR par exemple). Mais Mr Hébert souhaite qu’elle reçoive aussi tous les équipements qui ont été montés sur les 2CV produites à Mangualde (habillage des pare-chocs en plastique noir, feu de recul spécifique au marché allemand, sièges avants séparés avec appuie-tête…)

derniere 2cv mangualde
Les 3 dernières 2CV fabriquées sont deux 2CV 6 Spécial, une blanche et une rouge, et enfin la Charleston de Mr Hébert. Pour cette dernière année de production, seulement 9 954 exemplaires seront fabriqués. C’est le modèle AX de Citroën qui va prendre la place laissée par la 2CV sur les chaînes de production de l’usine de Mangualde.

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